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L'impulsion fondamentale qui met et maintient le moteur capitaliste en marche provient des nouveaux produits de consommation, des nouvelles méthodes de production, des nouveaux marchés, des nouvelles formes d'organisation industrielle que crée l'entreprise. — Joseph Schumpeter in Capitalisme, socialisme et démocratie
De cette citation de Schumpeter il est important qu'on déduise que la technologie n'est pas le seul vecteur d'innovation !
Introduction
Nous ne cessons de parler d'innovation depuis 1900. Vers 1929, le mot a pris; en 1950, on lui a connu une soudaine accélération qui ne s'est plus démentie jusqu'à nos jours. Aujourd'hui, il n'est plus un article consacré à la vie de l'entreprise qui n'aborde l'innovation de manière rapprochée ou distante. L'innovation est devenue un impératif d'un monde en perpétuelle évolution.
Scott D. Anthony fournit une définition plaisante de
l'innovation parce que courte et puissante : Quelque chose de différent
qui a de l'impact — Something different that has
impact.
Le quelque chose me convient bien parce qu'il résonne avec la citation de Schumpeter et qu'il ne rétrécit pas la sphère de l'innovation au champ technologique.
Le différent me parle aussi parce qu'il évoque une forme de voyage d'un est vers un sera. Il faut s'extirper du connu pour aller vers l'inconnu. Le mot me plaît davantage que nouveau notamment pour son côté perception alors que nouveau a une forme d'absolu binaire : c'est nouveau ou cela ne l'est pas.
Le terme impact est ambigu mais, au fond, il me plaît également car il donne le ton de la signifiance. On parle de quelque chose qui revêt un caractère important. Sans ce caractère sacré, on serait arrivé à inventer mais pas à innover. Il ne faut donc pas simplement exister mais aussi influencer, impacter. De plus, qui parle d'impact parle implicitement de mesure objective, car sans mesure comment savons- nous qu'il y a impact ? Pas de mesure, pas d'impact, pas d'innovation! Notez également que cette idée d'impact n'est pas dirigée, téléonomique. On ne dit pas que l'impact doit être financier, ou qualitatif/quantitatif, … loin de là . Un vaste champ d'impacts très divers est possible.
Innovation : Quelque chose de différent qui a de l'impact — Something different that has impact. — Scott D. Anthony in The Little Black Book of Innovation: How It Works, How to Do It. Harvard Business Review Press.
Une culture de l'innovation
On ne le répétera jamais assez, les Transformations Digitales sont centrées sur l'Humain. L'Humain est central, qu'il soit au sein de l'organisation (le collaborateur) ou à sa périphérie (le client / utilisateur) pour réussir une Transformation Digitale comme le rappelle la big picture :
Les organisations doivent donc mettre en place une véritable culture
d'innovation, doivent permettre la levée d'un ADN entrepreneurial pour
que chaque collaborateur puisse se sentir engagé au quotidien, ose
prendre part à l'amélioration continue au travers d'une collaboration
bien pensée et bien vécue, pour accepter le risque de ne pas réussir et
d'être jugé pour son manque de succès, pour que tout cela forme sens
pour chacun, pour que différents points de vue s'affrontent de manière
bienveillante au travers de compétences complémentaires. Il s'agit de
basculer d'un état passif et méfiant, souvent généré par de longues
années de réorganisations et de fusions/acquisitions successives à un
état de confiance, d'engagement et de prise de risque qui constituent le
terreau de l'innovation et des profits futurs — Olivier
Laborde in Innover ou disparaître
.
Il s'agit plus de démarrer de petites initiatives qui vont toutes sans relâche dans la même direction que de larges programmes. Le changement peut se faire par le biais de petites mesures qui, cumulées les unes aux autres, peuvent conduire à des changements significatifs pour la culture d'innovation des organisations.
Systémique
En cette période de changement de modèle et de monde — pour Michel Serres, nous ne faisons pas face à un monde qui change mais à un changement de monde — l'innovation est sur toutes les lèvres. Néanmoins, et c'est peut-être bien une des facettes ontologiques de l'innovation [1] , les projets d'innovation échouent très souvent notamment parce qu'elle n'est pas encore gravée dans la culture des organisations, parce qu'elle n'est pas systémique, voire, simplement, parce que c'est leur triste et tragique destin comme le signale Olivier Laborde [2] rapportant les dires de Jérôme Serre, CEO et fondateur d'Edupad, co-fondateur d'ExpoLab.
Une innovation systémique forme un système dans l'organisation. Elle est imprimée dans le processus de prise en compte d'initiatives, les aspirations comme je les appelle de manière générique. Ainsi, voyez comment une innovation érigée en système s'intègre dans l'entreprise pour organiser le financement des initiatives / aspirations :
Autre exemple, qui fait d'ailleurs le lien avec le précédent, voyez comment la construction d'un produit / service est systématiquement précédée d'un processus d'idéation.
Enfin, lorsque l'innovation est prise en charge de manière sérieuse, l'organisation se trouve bien souvent démunie en matière de méthodes rigoureuses pour mener l'innovation à réellement produire un impact. Il s'agit d'articuler des méthodes implacables de manière rigoriste sans étouffer la créativité, ni via les méthodes appliquées, ni par le contexte. [3]
To be continued
Le texte qui suit est temporaire
Nécessité d'idéation
Nous sommes en droit de nous poser la question de la nécessité
d'innovation, une question qui peut sembler pure rhétorique mais qui
débouche pourtant sur des débats passionnés et passionnants très
éloignés de simples platitudes. Sans vouloir entrer dans le détail
des réflexions qui peuvent nous étreindre, voici une "équation" qui
devrait nous éclairer concernant la profondeur des délibérations
possibles : Emploi = consommation / productivité
. Si on
considère donc que l'innovation impacte la productivité, l'équation
nous dicte qu'elle a nécessairement des effets sur l'emploi et/ou la
consommation. En d'autres termes, une productivité accrue, si elle
ne débouche pas sur une consommation renforcée, diminue l'emploi. Ce
constat seul peut provoquer bien des discussions enflammées où
s'opposeront bien des thèses contradictoires. Je me sens obligé de
rejeter ce débat, à regret, pour me permettre de couvrir mon sujet
de départ, les Transformations Digitales. Je congédie piteusement la
controverse car je considère que l'amélioration continue est une sorte de
nécessité humaine au-delà des bouleversements qu'elle peut susciter
et surtout parce que cette équation ne se trouve confirmée que
lorsque la productivité est issue d'investissements et donc de
l'engagement de coûts.
En matière d'amélioration continue, tout progrès est sincère et véritable, profitable s'il est examiné en lui seul et pour lui seul. Une meilleure collaboration entre les forces vives de l'organisation peut aussi s'envisager sans recourir à l'investissement, du moins tel qu'on l'entend comptablement. Dans ce cas, il appartient aux hommes et aux femmes de savoir comment concrétiser le gain réalisé.
Cette question d'amélioration continue est comme le mouvement d'une horloge qui ne s'arrête jamais. Elle améliore par réussites successives la machine où elle prend place, le système devrais-je dire. Elle ne se démarre pas de manière conventionnelle : elle se vit, elle vit, tout simplement. Elle n'a pas besoin d'idéation, très utile sans conteste, mais qui ici est débrayée par la continuité du phénomène. Ne dit-on pas, très justement, amélioration continue ? L'idéation est un outil mécanique; l'amélioration continue est phénomène organique. C'est là ce qui m'apparaît être le plus fondamental.
L'idéation est un outil mécanique; l'amélioration continue est phénomène organique.
J'ai la faiblesse de penser que cette notion d'amélioration continue est le moteur à plasma de l'innovation et qu'elle ne se limite pas, loin de là d'ailleurs, aux Transformations Digitales. Elle les transcende.
Footnotes
[1] … Les méthodes des start-up permettent de maximiser les chances de succès tout en bornant le risque. Car le risque est consubstantiel à l'innovation. La plupart des initiatives sont appelées à être des échecs commerciaux, mais permettent à d'apprendre en accéléré et de démultiplier son agilité tout en restant frugale, ce qui n'est pas une mince affaire pour une grande entreprise !
— Jérôme Serre
[2] … Laborde, Olivier. Innover ou disparaître : Le lab pour remettre l'innovation au cÅ“ur de l'entreprise. Dunod. 2017
[3] … On pense là à la structure courante en place et à ses procédures qui risquent de ne pas permettre à l'innovation de produire son réel potentiel, voire simplement de s'exprimer